Grundmann, VIIe partie, paragraphe 4 (Die Ketzerei im schwäbischen Ries) et VIIIe partie, avec ses notes importantes et sa conclusion. L’auteur fait remarquer (p. 430-431) que la mystique allemande n’est pas sortie (comme paraît le croire G. Théry, Contribution à l’histoire du procès de M. Eckhart, 1926) d’un développement théorique poussé à l’extrême par des théologiens trop épris de dialectique, mais d’un effort pour intégrer dans la théologie les expériences spirituelles des milieux populaires, en particulier des milieux féminins. Il cite des propositions répandues dès 1270 dans ces milieux et relevées par Albert le Grand, qui semblent aujourd’hui caractéristiques de la mystique d’Eckhart et de Ruusbroec (p. 430) ; il cite également certains poèmes de tendance spéculative et de date ancienne, en particulier le Driefaltigkeritslied (p. 476, note). On hésite d’abord à reconnaître l’ancienneté de ce texte, précisément parce qu’il faisait pâlir “l’originalité” d’Eckhart. Grundmann note que ce mot ne s’applique pas aux prédicateurs de la mystique allemande, et que ceci est la raison même pour laquelle les spécialistes ont tant de peine à formuler des attributions. “La contribution de chacun dans cette littérature, dit-il, ne peut pas être distinguée, et il est erroné de la rechercher : les théologiens se sont trouvés en présence d’une tâche historique et ils ont dû l’affronter en commun”. — Le R. P. Mens fait remarquer à son tour que si le génie ne saurait être contesté à Maître Eckhart, son originalité cependant n’a pas cessé de paraître moins grande à mesure qu’on l’étudie, depuis les dernières années du siècle passé (p. 166). Et l’auteur s’efforce de montrer la dépendance de la mystique spéculative allemande (en partie philologique, emprunts au R. P. Van Mierlo), qui ne sont pas tous également concluants. (Minnemystiek désigne le courant spirituel auquel appartiennent nos béguines, et comprend les deux aspect, affectif et spéculatif, dans leur continuité historique). — Sur la position dogmatique de Maître Eckhart, le R. P; Mens se rallie au jugement suivant : “Sans parler de sa bonne foi et de son orthodoxie subjective, toutes deux incontestables, on admet qu’il est resté objectivement orthodoxe quant au cœur même de sa doctrine, malgré que l’on rencontre accidentellement chez lui des expressions qu’il est impossible de défendre et qu’il faut taxer de panthéisme ou d’hétérodoxie. C’est en ce sens que Maître Eckhart est jugé aujourd’hui dans les cercles scientifiques les plus pondérés” (p. 167, note 185). L’accord semble moins général que ne le fait ici le savant historien des béguines.