Théorie de la musique/Pratique de l’exécution.


      Par «
pratique de l'exécution » ( traduction littérale de
l'expression all. Aufführungspraxis ), on désigne tout ce qui
est nécessaire à la réalisation sonore de la musique.
Plus on remonte dans l'histoire, plus grand est le fossé
qui sépare le texte écrit du résultat sonore.

      Diverses voies permettent d'aborder la pratique de l'exécution de la musique ancienne. Sont notamment utilisés :
     —
l'étude de la notation et l'étude comparative des sources : on peut ainsi éliminer les fautes et additions postérieures (réalisation d'éditions critiques du texte original, en all. Urtextausgaben) ;
     —
les représentations visuelles d'instr., de musiciens, d'exécutions ;
     —
les descriptions littéraires de la pratique musicale ;
     —
les ouvrages théoriques : traités de composition, d'instruments, etc. ;
     —
les directives ou indications pour l'exécution émanant du compositeur ;
     —
les documents d'archives : documents officiels, actes notariés, liste de musiciens, etc.).
      La restauration et la reconstitution d'
instruments anciens représentent un apport précieux. Le résultat est souvent étonnant pour nos oreilles d'aujourd'hui cela montre clairement que la musique se développe aussi en fonction de l'auditeur : si la musique a une histoire, l'audition possède aussi la sienne. — L'interprétation de toute musique (et notamment de la musique ancienne) doit se nourrir d'une vérité musicale « subjective », complétée par le savoir musical « objectif ».

     
Distribution des voix et orchestration
      Jusqu'au XVII
e s., les compositeurs prescrivaient rarement une distribution précise. On sait qu'au Moyen Âge les polyphonies relativement complexes étaient exécutées par des solistes, tandis que des compositions plus simples étaient confiées aux chœurs. On sait aussi que des instruments participaient à la musique vocale, mais on ignore de quelle manière.
      Pendant la Renaissance, les instruments accompagnaient les parties vocales. L'exécution dite a cappella (purement vocale) n'était pas aussi strictement pratiquée qu'on l'imaginait au XIX
e s.
      Dans la mesure du possible, chaque partie était confiée à un instr. donné, afin de favoriser la perception de la polyphonie ; pendant la période baroque se dégagea progressivement une réalité nouvelle qui devait s'affirmer à l'époque classique : l'orchestre, reposant essentiellement sur le groupe des cordes, et permettant des
alliances de timbres.
      La distribution comme élément de timbre apparaît vers 1600 chez un compositeur comme MONTEVERDI : Cf. p. ex. l'air d'Orfeo avec orgue, chitarrone et 2 violons. On utilisait aussi à cette époque des effets spatiaux, comme l'indique p. ex. SCHÜTZ dans la préface de ses Exequien : le chœur peut être divisé en 3 groupes distincts.
      On dirigeait généralement du clavecin (b. c.) ou du violon.
      Dans l'orchestre d'opéra du XVIII
e s., les cordes jouent le rôle essentiel. La disposition montre que la direction se faisait du clavecin, tandis qu'un 2e clavecin accompagnait le récitatif.
      L'accroissement considérable de l'effectif orchestral au XIX
e s. fit apparaître le chef d'orchestre de profession, qui devait coordonner un jeu d'ensemble toujours plus complexe,

      
Improvisation et ornementation
      L'un des grands problèmes que pose aujourd'hui l'exécution de la musique ancienne tient à la place importante qu'y occupait l'improvisation. Il s'agit notamment de
parties nouvelles improvisées, de l'exécution de la basse continue, de sections improvisées comme la cadence dans le concerto de soliste (jusqu'à BEETHOVEN) et de la pratique de l'ornementation.
      Chanteurs et instrumentistes italiens déployaient dans ce domaine une telle virtuosité qu'une mélodie toute simple était à peine reconnaissable. À titre d'exemple, MONTEVERDI note deux versions de l'air d'Orfeo : l'une sans, l'autre avec ornements.
      Une main anonyme a noté la complexité de l'extension donnée à un concerto de VIVALDI (XVIII
e s., PISENDEL ; certaines notes de base sont conservées).
      Au cours du XVIII
e s., la plupart des ornements disparurent, seuls subsistèrent, pour l'essentiel, le mordant et le trille. Les ornements étaient essentiellement affaire de goût.

      La
dynamique n'était généralement pas notée à l'époque baroque. Cette absence de notation ne signifie nullement absence de nuances, même si, à la différence des chanteurs et des cordes, p. ex., le clavecin et l'orgue étaient pratiquement réduits à la seule dynamique « par paliers ».

      Les
adaptations font aussi partie de la pratique d'exécution. Elles vont de la contrafacture (texte nouveau sur la même mélodie) et de la parodie (utilisation de motifs profanes dans la musique religieuse) à l'arrangement (musique légère), en passant par la transcription, la réduction pour piano et l'orchestration.


     
Théorie de la musique/Système musical I : fondements, intervalles


      Pour pouvoir transmettre des informations musicales, le matériau acoustique doit faire l'objet d'une sélection et d'une organisation : c'est ce que recouvre l'expression système musical. Les différents systèmes apparus selon les cultures et selon les époques ont en commun de privilégier, parmi les différents paramètres du son (hauteur, durée, intensité, timbre), la hauteur : c'est elle qui fonde une organisation opérée en fonction du principe de l'identité des octaves. Un système musical se caractérise par la manière dont est divisée l'octave : p. ex. en 12 demi-tons (Europe), en 22 shruti (Inde), etc.
      Dans le
système musical occidental, dont l'origine remonte à l'Antiquité grecque, le matériau sonore couvre 7 à 8 octaves (correspondant à l'aire audible), chaque octave comportant 12 demi-tons.
      Du point de vue musical, l'importance des rapports entre les sons est primordiale. Ces rapports apparaissent à travers les
échelles (ou gammes) utilisées.

     
Diatonisme
      Notre système repose sur une échelle heptatonique (7 sons), composée de 5 tons et 2 demi-tons. Cette succession de tons et de demi-tons porte le nom de
diatonisme (en grec : par tons).
      Les 7 sons de base sont do, ré, mi, fa, sol, la, si (en all. et en angl., ils sont désignés par des lettres) : touches blanches du clavier et portée inférieure. Les deux demi-tons se trouvent entre si-do et mi-fa.
     
Chromatisme
      La division des 5 tons engendre 5 autres demi-tons. On les note et on les désigne à l'aide des sons diatoniques voisins, qui peuvent être haussés d'un demi-ton par un dièse (#) et abaissés d'un demi-ton par un bémol (b) (touches noires du clavier et portée du milieu).
      La suite des 12 demi-tons s'appelle
échelle chromatique (du grec : chroma, couleur).
     
Enharmonie
      Dans le système tempéré, l'altération simple montante du mi et du si, descendante du fa et du do, ne produisent aucun degré nouveau : fa b = mi, si # = do, do b = si.
      De même, l'altération double, marquée par un double dièse (x) ou un double bémol (bb), hausse ou abaisse une note de 2 demi-tons, sans faire apparaître de nouveaux degrés : do x = ré, ré x = mi, mi bb = ré, etc. (portée supérieure).
      L'identité de degrés altérés porte le nom d'
enharmonie. Grâce à l'enharmonie, les 7 degrés diatoniques, les 14 degrés portant altération simple et les 14 degrés portant altération double donnent seulement 12 sons différents à l'intérieur d'une octave (nombre total de touches et portée supérieure).
     
Les intervalles sont les distances qui séparent deux sons. Leur nom est fondé sur la succession diatonique ; p. ex. : l'intervalle du 1er au 2e son est une seconde (portée inférieure : 1-2 = do-ré). Mais toutes les secondes (intervalles séparant deux sons consécutifs) ne sont pas identiques : ainsi, p. ex. ré-mi se compose de 2 demi-tons (seconde majeure), mi-fa d'un demi-ton (seconde mineure). Le nombre de demi-tons permet de préciser l'intervalle. Il y a à l'intérieur de l'octave :
     —
des intervalles justes : unisson, octave, quinte, quarte ;
     —
des intervalles majeures et mineurs seconde, tierce, sixte, septième ; un demi-ton sépare l'intervalle majeur du même intervalle mineur ; ex. la tierce majeure comporte 4 demi-tons ; la tierce mineure en comporte 3 ;
     —
des intervalles augmentés et diminués par altération de l'un des sons composant un intervalle juste, majeur ou mineur ; p. ex. : tierce diminuée do-mi bb (2 demi-tons), tierce augmentée do-mi # (5 demi-tons), quinte diminuée do-sol b (6 demi-tons), etc..
     
Les intervalles complémentaires se complètent en formant l'octave ; p. ex. : la tierce majeure fa3-la3 et la sixte mineure la3-fa4 formant l'octave fa3-fa4. Ils peuvent aussi apparaître par transposition à l'octave d'un des sons qui les forment (redoublement). Au-delà d'une octave, les intervalles portent le nom de neuvième (octave + seconde), dixième (octave + tierce), onzième (octave + quarte), douzième (octave + quinte). Ces intervalles sont divisés et évalués comme les intervalles simples.
      Les intervalles peuvent être simultanés, successifs, ascendants ou descendants.
     
Intervalles consonants et dissonants
      Les intervalles, en fonction de leur qualité, peuvent être classés selon le principe de la consonance, qui varie d'ailleurs considérablement avec le temps et le lieu. Dans le contrepoint d'école sont en principe considérés comme :
     —
consonants : l'unisson, l'octave, la quinte, la quarte dont la note principale est en haut, toutes les tierces et sixtes ;
     —
dissonants : toutes les secondes et septièmes, tous les intervalles augmentés et diminués, ainsi que la quarte dont la note principale est en bas.
      La consonance se caractérise par un haut degré de fusion et produit un sentiment de repos et de détente ; la dissonance produit une impression de frottement et de tension, et tend à se résoudre sur une consonance.


     
Théorie de la musique/Système musical II : tonalité


      La tonalité est une organisation hiérarchique des sons par rapport à un son de référence : la tonique. L'organisation des sons de ce système selon leur hauteur constitue une gamme ; l'ordre de succession des intervalles de la gamme détermine le
mode (majeur ou mineur).

     
La gamme majeure
      Les degrés de la gamme majeure se suivent selon le schéma d'intervalles suivant : 1-1-1/2-1-1-1-1/2, C'est en partant de do qu'on en a la représentation la plus simple : do-ré-mi-fa-sol-la-si-do. Cette gamme se compose de deux groupes de quatre notes ou
tétracordes identiques (1-1-1/2) : do-ré-mi-fa et sol-la-si-do. Ces deux tétracordes sont séparés par l'intervalle d'un ton. Un demi-ton sépare les sensibles mi et si des finales fa et do. Les quatre degrés situés aux extrémités de ces deux tétracordes sont liés par des relations particulières :
     — le 1
er degré (I) est la note fondamentale ou tonique ; elle se retrouve comme 8e degré ;
     — le 5
e degré (V) est la dominante il est situé une quinte au-dessus du Ie (relation de quinte) ;
     — le 4
e degré (IV) est la sous-dominante il se trouve une quarte au-dessus du 1er degré ou une quinte au-dessous du 8e : même relation de quinte qu'entre le 5e et le 1er degrés (rapport de dominante).

     
Les 12 tonalités majeures
      Elles s'obtiennent en prenant pour tonique chacun des 12 demi-tons. Le passage d'une tonalité à une autre porte le nom de
transposition.
      Par exemple, en transposant d'une seconde majeure (c'est-à-dire un ton) vers l'aigu, on passe de do (ou ut) majeur à ré majeur.
      Toute transposition entraîne l'altération de certaines notes, pour que l'ordre de succession des tons et demi-tons, caractéristique du mode, se retrouve identiquement : ex., fa devient fa #, do devient do #
      Les sons ainsi altérés ne sont pas des variantes chromatiques, mais des degrés diatoniques appartenant à la gamme.

     
Le cycle des quintes
      Il reflète la relation par quinte des tonalités. Les notes fondamentales de deux tétracordes voisins se trouvant à distance de quinte, le tétracorde supérieur d'une tonalité est toujours le tétracorde inférieur de la tonalité voisine, et inversement. Chaque transposition à la quinte entraîne l'addition d'un dièse ou d'un bémol, jusqu'à l'apparition de six altérations. Dans le système tempéré, sol b majeur est identique à fa # majeur. Grâce à cette identité enharmonique, les tonalités à bémols et à dièses se referment en un cercle, le cycle des quintes.

     
La gamme mineure
      Elle est issue du mode ecclésiastique éolien. Son schéma est 1-1/2-1-1-1/2-1-1 (à partir du la, elle se réalise sans altération avec les sons de base la-si-do-ré-mi-fa-sol-la). Des modifications dans le tétracorde supérieur permettent de distinguer trois formes de mineur :
     —
le mineur naturel (éolien), avec int. de ton entre le 7e et le 8e degré ;
     —
le mineur harmonique, avec intervalle de demi-ton entre le 7e degré (note sensible) et le 8e degré, sur le modèle du mode majeur. Cette sensible, qui forme un intervalle de tierce majeure avec le 5e degré (dominante), fait apparaître une seconde augm. entre le 6e et le 7e degré ;
    —
le mineur mélodique élimine la seconde augmentée, difficile à chanter, que comporte le mineur harmonique ; le 6e degré est également haussé : se trouvent ainsi superposés un tétracorde mineur et un tétracorde majeur. Comme la sensible n'est requise qu'en montant, le mineur mélodique descendant se confond avec le mineur naturel, avec sensible descendante vers la dominante.

     
Le mineur dit « tzigane » est une variante du mineur harmonique, comportant une seconde sensible montant vers la dominante.
      Ces schémas déterminent les modes mineurs. Leur transposition fait apparaître 12 tonalités mineures (do min., ré min., etc.).

     
Les tonalités relatives
      A chaque tonalité majeure correspond une tonalité mineure relative, dont la tonique est située une tierce mineure au-dessous de celle de la tonalité majeure.
      Les tonalités relatives sont constituées des mêmes notes, et comportent donc les mêmes altérations. Elles peuvent être représentées par le même cycle des quintes. On utilise des capitales pour désigner le majeur, des minuscules pour le mineur (DO = do majeur, do = do mineur).

     
Gammes usuelles
      Dans le système tempéré sont utilisées quatre gammes différentes :
     —
la gamme pentatonique : gamme de 5 sons, sans demi-ton, comportant 3 tons et 2 tierces mineures, p. ex. do-ré-mi-sol-la-(do) ; succession des intervalles : 1-1-1 1/2-1-1 (1 1/2) ;
     —
la gamme par tons : gamme de 6 sons, sans demi-ton, comportant 5 tons, p. ex. : do-ré-mi-fa#-sol#-la#-(do) succession des intervalles : 1-1-1-1-1-(1) ;
     —
la gamme diatonique gamme de 7 sons (5 tons et 2 demi-tons ex. ; le majeur) ;
     —
la gamme chromatique : gamme de 12 sons, suite de 12 demi-tons.


     
Théorie de la musique/Système musical III : théories


      On peut mesurer les rapports entre les sons selon un principe quantitatif, celui de la distance, et les évaluer selon un principe qualitatif, celui de la consonance.
      Le premier permet de définir exactement l'intervalle entre deux sons. Depuis ELLIS (1885), on utilise comme unité le
cent (un demi-ton = 100 cents). Si le principe quantitatif permet une description des systèmes musicaux, il ne donne aucune indication sur les relations entre les sons.
      Celles-ci peuvent être définies grâce au classement des intervalles opéré selon le
principe de consonance. Les théories du système musical s'efforcent de donner un fondement au caractère consonant ou dissonant des intervalles.
      1.
Les théories de l'Antiquité : les proportions numériques. Le degré de parenté des intervalles se détermine conformément aux rapports numériques correspondant aux longueurs des cordes. Plus le rapport est simple, plus l'intervalle est consonant. Sont considérées comme consonantes : l'octave avec 1/2, la quinte avec 2/3 et la quarte avec 3/4. On peut représenter ces proportions par les nombres 6, 8, 9, 12 ; à l'intérieur de l'octave apparaissent ainsi deux quintes, deux quartes et un ton (8/9).
      Les autres intervalles se déduisent des trois premiers. Ils sont dissonants en raison de leurs proportions numériques plus complexes. Ainsi, la tierce majeure est la somme de deux tons, le demi-ton est la différence entre deux tons et une quarte.
      2.
La superposition de quintes (système pythagoricien). Des sons à distance de quinte —p. ex. ré-la— sont en relation au Ier degré ; à distance de deux quintes —p. ex. ré-(la) -mi — ils sont en relation au 2e degré, etc.. — La quinte pythagoricienne, définie par le rapport 3/2, s'obtient par division de la corde du monocorde ; elle est stricte (c.-à-d. physiquement juste) et un peu plus grande que l'actuelle quinte tempérée (702 cents au lieu de 700). La quarte — qui complète la quinte pour former l'octave — est stricte également (un peu plus petite que la quarte tempérée). La superposition de quintes strictes donne :
     —
la gamme pentatonique sans demi-ton (5 quintes) : do-sol-ré-la-mi ; après réduction d'octaves : ré-mi-sol-la-do ;
     —
la gamme heptatonique diatonique (7 quintes) : fa-do-sol-ré-la-mi-si ; après réduction d'octaves : ré-mi-fa-sol-la-si-do(ré).
     —
la gamme chromatique à demi-tons (12 quintes) : elle peut s'obtenir soit en montant à partir de si (fa # - do # - sol # - ré # - la #), soit en descendant à partir de fa (si b-mi b-la b-ré b-sol b). Selon la progression, la hauteur des demi-tons est différente : ainsi, p. ex., la # et si b ne sont pas identiques. Le système n'est pas fermé, car le produit de 12 quintes strictes est légèrement supérieure à celui de 7 octaves. La différence est de (3/2)12 : (2/ 1)7 = 531 441/524 288, soit environ 74/73, 23,5 cents, ou 5,88 savarts, c'est-à-dire à peu près un quart de demi-ton (comma pythagoricien).

     3.
La division harmonique de l'octave (système zarlinien). La division harmonique de l'octave (1/2) donne la quinte et la quarte (2/3 et 3/4) ; celle de la quinte (2/3), la tierce majeure et la tierce mineure (4/5 et 5/6) ; celle de la tierce majeure (4/5), le ton mineur et le ton majeur (8/9 et 9/10). Pas plus que le système pythagoricien, le système zarlinien n'est clos : la superposition de 6 tons ne coïncide pas avec l'octave. La différence entre ton majeur et ton mineur est de 81/80, soit 21,5 cents, environ 1/5 de demi-ton (comma syntonique). Dans l'accord au ton moyen, ce comma est éliminé mais les tierces majeures restent strictes.

      4.
La division égale de l'octave (système tempéré). L'octave est divisée en parties égales. Divisions tempérées de l'octave :
     —
à 5 sons dans le slendro javanais (chaque intervalle 1 1/5 ton) ;
     —
à 6 sons dans les deux gammes par tons tempérés do-ré-mi-fa# -sol#-la#-(do) et ré b-mi b-fa-sol-la-si (ré b) ;
     —
à 12 sons : dans la gamme chromatique (chaque intervalle : 1/2 ton ou 1/12 octave) ;
     —
à 18 sons dans la gamme à tiers de tons
     —
à 24 sons dans la gamme à quarts de ton.

      5.
La série des harmoniques, succession de sons dont les fréquences sont des multiples entiers de celle du son fondamental, découverte par SAUVEUR en 1700, a été souvent utilisée, depuis RAMEAU (Génération harmonique, 1737), pour tenter de donner un fondement naturel au système musical (théorie dite de la « résonance »). La série contient tous les intervalles, des plus simples dans le grave aux plus complexes dans l'aigu (du do1 jusqu'au 16e harmonique). Les sons 7, 11, 13 et 14 sont un peu plus bas que dans le système tempéré, de sorte que la septième mineure (7/4), notamment, est un peu plus petite que l'intervalle tempéré. Les harmoniques 4, 5 et 6 forment un accord parfait majeur naturel avec tierce majeure et tierce mineure (4/5 et 5/6) ; les harmoniques 7 et 9 forment les accords de 7e et de 9e de dominante. Mais il n'existe pas d'accord parfait mineur correspondant.


     
Théorie de la musique/Système musical IV : histoire


      Le système musical occidental remonte à l'Antiquité grecque. Les Grecs basèrent leur système modal sur un
tétracorde (série de quatre sons) dont les notes extrêmes étaient fixes, les intermédiaires, mobiles, déterminant les 3 modes possibles : le diatonique, le chromatique et l'enharmonique. Notre système musical utilise senlement le mode diatonique avec des hauteurs fixes et renonce aux possibilités de variations, originellement mélodiques, de l'enharmonique et du chromatique grecs (ces deux concepts ayant une autre signification dans le système tonal moderne).
      Les
modes grecs se composaient de 2 tétracordes, comme les nôtres, formant l'octave avec 7 sons différents.

     
Les modes ecclésiastiques
      Le M. Â. distingua 8 (puis 12) divisions de l'octave d'après le modèle gr., les
modes ecclésiastiques (modi), qui reçurent le nom des modes gr. À la suite d'un contresens, dorien désigne ré, phrygien mi, lydien fa, mixolydien sol, etc., ce qui diffère de la nomenclature grecque.
      On ne considère toujours pas la hauteur absolue, mais les rapports entre les degrés. Les modes ecclésiastiques sont donc des systèmes d'octave comparables au majeur et au mineur. Ils peuvent de ce fait être transposés, c.-à-d. construits à partir de chacun des degrés, ex. : le dorien à partir de sol, avec 1b comme altération car il est transposé à la quarte sup. (de ré à sol). Le caractère des modes ecclésiastiques n'est pas seulement déterminé par les rapports entre les degrés, mais aussi par l'organisation du plain-chant momodique :
     —
ambitus (étendue) : les mélodies évoluent souvent dans un ambitus d'octave ;
     —
finale : sorte de fondamentale ou tonique de la mélodie ;
    —-
teneur (ton de récitation) : souvent une quinte au-dessus de la finale ;
     —
formules mélodiques initiales ou cadentielles : tournures caractéristiques qui apparaissent souvent.
      À chaque ton principal authente (ex. : dorien), correspond une tonalité secondaire plagale (hypodorien) avec la même finale.
      L'ambitus est alors décalé d'une quarte vers le grave, la finale se trouve au milieu de l'échelle et la teneur est en principe la tierce. Les 8 modes ecclésiastiques médiévaux passent à 12 au XVI
e s. (GLAREAN, Dodekachordon, Bâle, 1547) :
     —
l'éolien ou cantus mollis devint le mineur (éolien) ;
     —
l'ionien ou cantus durus devint le majeur ; tous deux ont leur mode plagal. Le système s'enrichit des demi-tons chromatiques par la transposition des gammes diatoniques.

     
Le système tonal majeur-mineur
      Au XVII
e s., majeur et mineur supplantent peu à peu les modes ecclésiastiques. Le système tonal moderne diaromique-chromatique-enharmonique ne peut cependant se développer totalement qu'avec le tempérament égal (WERCKMEISTER, Vers 1695), qui élimine les différences (commas) des systèmes précédents en divisant l'octave en 12 parties mathématiquement égales.
      Pour cela, on renonce à la justesse naturelle des quintes : 12 quintes strictes, ascendantes ou descendantes, dépassent 7 octaves d'un comma pythagoricien, que l'on supprime en raccourcissant légèrement chaque quinte.

     
Possibilités plus récentes
      À côté du rapport de quinte, le
rapport de tierce prend de l'importance au XIXe s.
     — La superposition de
tierces majeures mène aux 4 séries possibles : do-mi-sol#, ré b-fa-la, ré-fa#-la# ; et mi b-sol-si.
     — Les
tierces mineures forment les 3 séries suivantes : do-mi b-sol b-la, do#-mi-sol-si b et ré-fa-la b-si.
      Pour toutes ces séries, on tient compte des équivalences enharmoniques du système tempèré, sol dièse = la bémol, la dièse = si bémol, etc..
      Le rapport de tierce s'applique aux notes elles-mêmes mais aussi aux fondamentales des accords majeurs et mineurs. Ainsi do maj. et mi maj. sont en relation de tierce majeure, de même do maj. et mi min., etc.
      Au XIX
e s., les rapports tonals, c.-à-d, l'organisation des sons autour d'une tonique commune, s'élargirent au point que les forces qui les créaient devinrent insuffisantes. Le système tonal s'effondra. À la place, on imagina d'autres systèmes, à partir :
     — d'une
échelle ; p. ex. : la gamme par tons (DFBUSSY) ou d'autres construites différemment (BARTÔK) ;
     — d'un
intervalle ; p. ex. : la quarte comme dans l'« accord synthétique ou mystique » dans l'op. 60 de SCRIABINE ou les superpositions de quartes dans la Kammersymphonie op. 9 de SCHOENBERC, (1906) ;
     — d'une
série de 12 sons, selon la technique de SCHOENBERG, « composition au moyen de 12 sons n'ayant que des rapports réciproques ».
      Avec l'introduction d'autres paramètres que la hauteur des sons, notamment le
timbre, la construction de systèmes tonals orientés sur les fréquences perd de son importance.
      On distingue de moins en moins le bruit du son musical selon le critère de la fréquence. Des catégories structurelles à caractère général telles que contraste, symétrie, variation, etc., cherchent à remplacer les catégories plus spécifiques du système tonal.

       ( Suite )  


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